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Taxe foncière et bail professionnel : les mauvaises surprises

La taxe foncière constitue, en principe, un impôt direct incombant au propriétaire d’un immeuble (article 1400 du Code Général des impôts). Toutefois, dans le cadre d’un bail professionnel ou d’un bail professionnel ou d’un bail commercial, cette charge peut être contractuellement transférée au locataire. Cette pratique, licite mais parfois lourde de conséquences financières, mérite une attention particulière lors de la négociation et de la gestion du bail. Econotax vous éclaire sur les enjeux à garder à l’esprit !

Un cadre légal encadré mais souple

L’article L. 145-40-2 du Code de commerce dispose que les charges, impôts, taxes et redevances liées au bien loué peuvent être mises. à la charge du locataire, à condition que cette répartition soit clairement stipulée dans le contrat. À défaut de clause expresse, la taxe foncière demeure à la charge exclusive du bailleur.

 

La jurisprudence a d’ailleurs confirmé à plusieurs reprises que ce transfert est possible, mais doit être explicite et ne peut pas résulter d’une interprétation implicite du bail (Cass. 3e div., 10 septembre 2013, n°12-20.636).

 

Il convient de distinguer : 

  • Le bail commercial soumis au statut des baux commerciaux (articles L. 145-1 et suivants du Code de commerce), où la liberté contractuelle est limitée par certaines dispositions d’ordre public, notamment depuis la loi Pinel du 18 juin 2014, qui encadre la répartition des charges.
  • Le bail professionnel (réglementé par l’article 57 A de la loi du 23 décembre 1986), qui bénéficie d’une liberté contractuelle beaucoup plus large, laissant aux parties la faculté d’aménager comme elles l’entendent la charge fiscale.

Les principaux écueils pour les locataires

Si le transfert de la taxe foncière est autorisé, plusieurs difficultés pratiques apparaissent fréquemment : 

  1. Une charge mal anticipée : de nombreux preneurs découvrent auprès coup que la taxe foncière leur est imputéé, faute d’avoir examiné attentivement les clauses de leur bail. cette situation peut générer un coût significatif, particulièrement dans les zones urbaines où les valeurs locatives cadastrales sont élevées.
  2. Un manque de transparence : la taxe foncière évolue chaque année en fonction des bases d’imposition et du coefficient de revalorisation fixé par la loi de finances. Le locataire, tenu de rembourser un impôt dont il ne maîtrise ni l’assiette ni le montant, se retrouve exposé à une forte imprévisibilité budgétaire.
  3. La question des tantièmes en copropriété : dans les immeubles soumis au régime de la copropriété (loi du 10 juillet 1965), la taxe foncière est souvent répartie entre copropriétaires selon les tantièmes de propriété. Le bailleur peut ensuite refacturer au locataire cette quote-part, même si celle-ci ne correspond pas à l’usage effectif du local loué. Il n’est pas rare que cette méthode conduise à une charge disproportionnée, par exemple lorsqu’un local professionnel occupe une surface réduite mais supporte des tantièmes importants en raison de sa situation dans l’immeuble.
  4. Une contestation difficile : une fois le bail signé, il est complexe pour le locataire de remettre en cause la répartition contractuelle des charges, sauf à invoquer une clause abusive ou imprécise. Les tribunaux exigent en effet une clause claire et non équivoque pour transférer la taxe foncière (Cass. 3e civ., 12 janvier 2005, n°03-17.639).

Les conséquences financières

Une mauvaise négociation sur ce point peut se traduire par :

  • Une augmentation significative des charges annuelles, pensant sur la trésorerie de l’entreprise.
  • Un déséquilibre économique du bail, notamment si la répercusion ne tient pas compte de l’usage réel du bien.
  • Des litiges avec le bailleur ou le syndic, sources de frais supplémentaires et d’incertitudes juridiques.

Comment sécuriser sa position ?

Afin d’éviter ces mauvaises surprises, plusieurs précautions peuvent être prises :

  1. Avant la signature du bail : il est essentiel de vérifier attentivement les clauses relatives aux charges. Le locataire doit s’assurer que la taxe foncière n’est pas transférée de manière globale et imprécise, mais selon un mode de calcul transparent. La pratique la plus équitable consiste à fonder la refacturation sur la surface réelle occupée plutôt que sur les tantièmes de copropriété.
  2. Pendant l’exécution du bail : le locataire a la possibilité d’accéder aux bases d’imposition de la taxe foncière via son statut d’assujetti à la cotisation foncière des entreprises (CFE). Cette information peut lui permettre de comparer le montant refacturé avec la réalité fiscale et, en cas d’écart significatif, d’ouvrir une discussion avec le bailleur ou le syndic.
  3. La négociation proactive : lors du renouvellement ou de la signature d’un bail, il est possible de négocier des clauses spécifiques limitant la refacturation de la taxe foncière ou encadrant son évolution. Dans certains cas, il peut être pertinent de solliciter une clause de plafonnement ou de répartition proportionnelle à l’usage réel.

Conclusion

Le transfert de la taxe foncière au locataire dans le cadre d’un bail professionnel est une pratique légale et fréquente, mais qui peut devenir une source de déséquilibre si elle est mal encadrée. La vigilance lors de la lecture du bail, la transparence dans la répartition et l’anticipation lors de la négociation constituent les meilleures garanties pour éviter une charge fiscale excessive et préserver l’équilibre financier de l’entreprise.

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